denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

vous avez une monnaie à faire identifier? postez la ici!
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isabelle Lerquet
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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par isabelle Lerquet » 22 févr. 2020 10:

Merci pour cette référence de film Manuds.

Concernant les cauris, Ciré, j'ai lu le fameux article dont tu parles. Il est très instructif. Il est composé de deux parties.Outre les boutres arabes, on peut aussi ajouter, comme tu l'as noté, les navires hollandais et anglais. Toutefois, les Français ont vite perçu l'intérêt de se fournir en cauris par eux même, cela leur revenaient beaucoup moins cher.
Dans les navires de la compagnie des Indes françaises, deux navires ont attiré mon attention : La Badine (1730-1732) et la Vierge de Grâce (1729-1732) avec leur voyage presque circumpolaire.Les deux navires ont fait une campagne intéressante : Lorient, Sénégal, Gorée, cap de Bonne-Espérance, île de France, Bourbon, Inde, Lorient. La Vierge de Grâce : Lorient, Sénégal, Gorée, île de France, Inde, Lorient.

Ces deux navires sont passés par les côtes sénégalaises (embouchure du fleuve Sénégal et île de Gorée) avec ensuite passage par l'île de France (l'île Maurice). Je suis en train de consulter leur journal de bord, mais il serait intéressant de retrouver les registres des cargaisons qui pourraient me permettre de retrouver des traces d'achat de cauris en roupies de Pondichéry.
Pourquoi j'insiste autant sur les cauris, c'est pour la bonne et simple raison que les Français utilisent ces coquillages pour l'achat d'esclaves auprès des Maures qui longent le fleuve Sénégal et des marchands d'esclaves africains près de Ouidah au Bénin. Gildas Salaün, dans ses articles sur la relation entre achat d'esclaves par les Français et les cauris, a expliqué que durant le XVIIIe siècle, un système a été mis en place pour fabriquer à moindre frais des monnaies d'argent.
Selon le système économique du colbertisme (avoir le plus possible de métal d'argent sans pour autant dépenser une tonne d'argent pour en avoir), les monnaies d'argent produites en France et à Pondichéry étaient fabriquées avec des monnaies gourdes. Ces monnaies gourdes étaient les monnaies de 8 reales frappées au Pérou ou en Espagne.
Comment ces monnaies étaient-elles captées ?
Pendant longtemps, le mythe de la piraterie a été privilégié, mais en réalité, le plus grand marché aux esclaves de l'époque moderne était français : Saint Domingue. Là, les esclaves "fraîchement" arrivés d'Afrique sont vendus à l'espagnol, soit contre des monnaies espagnoles ou hollandaises avec une forte teneur en argent. Les monnaies captées sont ensuite ramenées vers la métropole où elles sont divisées en deux catégories :
- celles qui vont être transformées dans les ateliers français
- celles qui vont être transformées en roupies de Pondichéry.
C'est là que la Compagnie des Indes prend tout son sens. Elle transporte les monnaies gourdes jusqu'en Indes, de manière privilégiée Pondichéry. Les roupies émises servent alors à acheter des produits recherchés par la métropole. Selon Toyomu Mazaka (spécialiste des échanges monétaires au XVIIIe siècle), les roupies servent aussi à acheter des produits qui feront du lest, mais pas forcément enregistrés sur les registres de la Compagnie (contrebande ou simplement enrichissement du capitaine....les deux je dirais). Ces cauris embarqués servent de lest aux navires. Arrivés à lorient, Nantes ou Bordeaux, ces tonnes de cauris sont laissés dans les cales du navire et emmené directement en Afrique pour être échangés contre des esclaves ou même des peaux d'animaux.
Dans des registres de traite, 'j'ai retrouvé le prix que coûtait un jeune homme de 18 ans en bonne santé : 45 000 cauris ; une femme de 18 ans en bonne santé : 30 000 cauris et un enfant 15000 cauris. Les peaux d'animaux et les défenses d'éléphant (morfil) ou d’hippopotame (défense de rivière) coûtaient entre entre 45 000 et 50 000 cauris les 10 morfils.

Lors de mes recherches à la BnF, j'ai constaté que les comptoirs sénégalais (Saint-Louis, Gorée et Portendick) étaient les étapes incontournables sur les routes commerciales de l'époque. J'ai même émis l'idée que le Sénégal pouvait être considéré comme un grand carrefour commercial de type hub and spoke. Des marchandises arrivent, sont déposées dans des arsenaux, puis chargées dans d'autres navires ou dans des caravanes afin de déservir d'autres grands marchés internationaux. J'ai aussi pu remarqué que presque tous les jeunes employés de la Compagnie des Indes faisaient leurs armes à Gorée ou à Saint-Louis, voire même dans des comptoirs intérieurs comme Richard-Toll le long du fleuve Sénégal.

Donc si je pouvais continuer à développer mon idée et expliquer que le Sénégal était relié par voie de mer aux comptoirs indiens, cela me permettrait de renforcer ma démonstration : Un double commerce triangulaire existait et s'entrecroisait avec le commerce triangulaire atlantique. Nous n'aurions pas eu un monde économique fermé, mais un monde économique ouvert que l'on pourrait comparer à notre actuelle mondialisation.

J'espère ne pas avoir perdu trop de membres avec ma réflexion :lol: :lol: :lol: :lol:

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isabelle Lerquet
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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par isabelle Lerquet » 22 févr. 2020 10:

Désolée pour le pavé indigeste... :lol: :lol:

:arrow: je sors :lol: :lol: :lol:

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par ciré 46 » 22 févr. 2020 11:

Bonjour Isabelle, et les autres membres bien sur :!: :lol: :lol: :lol:
Je suis au courant d'une partie de ce que tu raconte, et je vais jeter un œil sur ce que je peut trouver sur les navires que tu cite.
Dans les anales Bretagne Pays de l'Ouest, un article de Philippe Haudrère intitulé: Heurs et malheurs des voyages maritimes sur la route des Indes orientales au XVIII eme siècle va te confirmer ce que tu pense sur la contrebande organisée sur les navires par l'équipage; capitaine en tête, que je soupçonne de toucher des dividendes pour fermer les yeux ;) ;) J'en ai trouver des trace à Pondichéry sur des affaires d'importations depuis Lorient.
Je vais fouiller ce que je peut trouver, et dans les docs que j'ais :!:

Désolé pour les membres du forum que cela n'intéresse pas :oops: :oops: :oops:

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par ciré 46 » 22 févr. 2020 18:

Salut Isabelle,
Infos et pistes intéressantes à creuser sur: cauris et traite négrière au XVIII siècle-CGB.fr ;) ;)
A plus :!:

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par ciré 46 » 25 févr. 2020 19:

Bonjour,
J'ai trouvé la transcription du journal de bord de"La Vierge De Grace" pour le voyage de 1729 à 1732.
Apparemment, il y a achat d'esclave en descendant le long de l'Afrique, mais les achats sont faits avec des fusils, de la poudre et des objets de peut de valeur, sauf une pendule offerte à un roi local.
Les voyages des navires suivaient la route des vents selon les saisons; la route principale en partant de Lorient consistait à descendre sur les Açores, puis sur les Canaries ( en fonction des guerres), les îles du Cap Vert, puis descendre le long des côtes de L'Afrique jusqu'au Cap (avec des vents contraires, ce qui rendait le voyage long et pénible) pour les navires qui faisaient de la traite. Ils chargeaient des esclaves au grès de leurs haltes en eau libre, ou dans les comptoirs alors que ceux qui faisaient du commerce directe, faisaient route vers le sud du Brésil depuis les îles du Cap Vert, puis repiquaient vers le cap (Afrique du Sud); puis continuaient dans l’océan Indien, par divers routes selon la destination finale ( Mascareignes, Pondichéry, Chine). Pour le retour, à partir du Cap, il y avait une route commune qui remontait sur St Hélène et les île Ascension,là, deux routes s'offraient aux capitaines selon leur chargements, soit la route plein Nord pour rejoindre Lorient en passant au milieu de l'Atlantique, soit, route Ouest pour rallier la Martinique, (les vents portent sur la Martinique ) puis la Guadeloupe, St Domingue, ( plus tard jusqu'en Louisiane) et de là repiquaient sur Lorient.
Durant toutes les escales les marchandises rentraient et sortaient des cales au grès des ventes et des achats de "marchandises".
Très peut d'informations sur la traite; sur les registres de décès de Pondichéry j'ai relevé beaucoup de mort d'esclaves dits"Mozambique, Cafres et Malabars et Tamouls".
Je ne trouve pas d'info sur des achats d'esclaves en cauris. Les achats sont inscrits sur certains livres, mais pas les moyens de payement.

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par isabelle Lerquet » 25 févr. 2020 21:

Merci pour cette information sur les marchandises de traite. En effet, les fusils, la poudre à canon, les étoffes bleues (Guinées de Pondichéry) sont très prisées.
Je prends note du trajet exact de la Vierge de Grâce.

En ce qui concerne l'article CGB sur la traite négrière et les cauris, c'est celui de Gildas Saläun dont je te parlais tantôt. Il en a fait un second sur le même thème. Je les ai lu avec grand intérêt.
Voici grosso modo tous les articles et livres que j'ai lu sur le sujet :

Abiola, F. I. (1991, 3e trimestre). les hommes d'affaires français et le commerce des cauris du XVe au XIXe siècle. Revue française d'histoire d'Outre-mer, tome 78(292), pp. 259-374.
alii, r. M. (1966). Texte et documents relatifs à l'histoire de l'Afrique, Extraits tirés des voyages d'Ibn Battuta, Dakar, Publications de la Faculté des lettres et sciences humaines. Histoire(9).
Beker, C. (1986). Note sur les chiffres de la traite atlantique au XVIIIe siècle. Cahier d'études africaines, vol. 26(104), pp. 633-679.
Curtin. (1975). Economy, Change, Precolonial Africa Senegambia in The Era of the Slave Trade. Madison : the University of Winsconsin Press.
Mazaki, T. (2016, janvier ). Movements of silver coins between France and Senegal, 1833-1925 : Evidence from Frenc Trade Statistics. Discours Paper Series(26), 1-22.
P Haudère, G. L. (2010). Les compagnies des Indes . Paris : Editions Ouest-France.
Rivallain, J. (2001). Monnaies d'Afrique : visions africaines et visions européennes. Revue numismatique, 6e série, tome 157, pp. 121-130.
Salaün, G. (2015). Les cauris et la traite négrière au XVIIIe siècle. Paris .
Salaün, g. (2017, septembre-octobre ). Les circuits monétaires de la traite négrière. Monnaie Magazine , pp. 1-9.

Voici une très courte biblio sur ce qui peut exister concernant l'utilisation des Cauris au Sénégal.

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par ciré 46 » 26 févr. 2020 09:

Bonjour,
pour ceux que cela intéresse; carte des vents interactive en cliquant sur un point, vous avez le point géographique, la vitesse du vent et la direction; vous pouvez faire le tour du globe.
Bien sur cela donne une idée, mais ne naviguez pas avec :!: :!: ,il y a des infos plus précises sur les infos maritimes.

Lien: earth.nullschool.net
cliquez sur earth et le globe va apparaître, bon vent :lol: :lol: :lol: et bonne navigation ;) ;) ;)
Il faut savoir que les courants marins de surface suivent à peut prêt les mêmes trajets. Vous pouvez comprendre les trajets des navires de la Cie que j'ai expliqué précédemment.
Isabelle, je vais faire un tour d’œil sur les réf. que tu as donné.

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par isabelle Lerquet » 27 févr. 2020 09:

Je viens d'aller voir l'application que tu recommandes. Il est vrai qu'elle est intéressante et permet bien de retrouver les trajectoires des navires de la Compagnie des Indes. C'est très instructif et permet aussi de répondre à des questions toutes simples. Il ne faut pas oublier que les navires dont nous parlons sont tous des navires à voiles et donc, par conséquent, soumis aux aléas des vents...

Si tu as besoin des traductions de certains articles, je peux te les faire passer via email (en MP) si tu le souhaites.

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par ciré 46 » 28 févr. 2020 08:

Bonjour Isabelle,
Je n'ai pas pris le temps de consulter les références que tu m'a donner; je vais le faire dans les jours prochains. Je ferais appelle à toi pour la traduction des articles en Anglais :) :) cette langue n'est pas ma tasse de thé :lol: :lol: :lol:
Avec la carte des vents, tu te rend bien compte que le trajet des navires étaient définis par la facilité de navigation. Avec un voilier moderne cela n'est pas toujours facile de remonter le vent en tirant des bords, mais avec les navires de cette époque, cela devait être mission impossible, avec beaucoup de manœuvres de voiles et peut de route faite par 24 h, sans compter la dérive due au courants de surface. Les navires n'avaient pas des coques taillées pour la course, mais pour le transport.

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Re: denier d'un roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine

Message par isabelle Lerquet » 28 févr. 2020 08:

Effectivement, je m'en rends bien compte.
Dans ma bibliothèque, j'ai un livre qui traite des voyages du navire L'Aurore. L'archiviste qui a réalisé le livre, explique que ce négrier a dû à plusieurs reprises dévier sa route pour pouvoir accoster en Angola. Il a même failli couler parce que le barreur a raté sa manœuvre !

N'hésite pas à revenir vers moi pour les textes en anglais voire même ceux en latin, aucun souci ;)

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